Marchés financiers : aperçu de la situation
Par Yves Kazadi, Senior Analyst - 18/11/2025
Les marchés à deux vitesses
Cet automne, les marchés financiers offrent un paysage contrasté. Les actions demeurent bien orientées, portées par la vigueur des grandes valeurs technologiques américaines et les révisions des estimations de bénéfices. En revanche, les marchés obligataires présentent un profil plus nuancé, oscillant entre signes de stabilisation et tensions persistantes.
Revalorisation des actions émergentes
Les marchés actions ont poursuivi leur progression en octobre, soutenus par la révision à la hausse des bénéfices des entreprises. À l’échelle mondiale, les analystes ont relevé leurs estimations de profits de 5,2 % sur les trois derniers mois, confirmant la solidité du cycle bénéficiaire.1
Cette dynamique reste portée par les géants technologiques américains et l’essor de l’intelligence artificielle (IA). Mais pas uniquement comme en témoignent les records atteints par plusieurs indices européens dont le Bel 20, qui a franchi pour la première fois de son histoire le seuil des 5 000 points.2
En outre, quelques signes de surchauffe commencent à apparaître du côté des valeurs technologiques américaines. Elles se négocient désormais à près de 8,5 fois leur chiffre d’affaires, un niveau proche des précédents pics. Les écarts de valorisation sectoriels se sont également accentués, atteignant des sommets, notamment entre les secteurs technologiques et énergétiques. Ce dernier devient pourtant stratégique pour le développement de l’IA alors que la multiplication des centres de données exerce une pression croissante sur les réseaux électriques.
Cette situation devrait renforcer le mouvement de rotation déjà amorcé sur les marchés. Une normalisation des valorisations favoriserait notamment les valeurs financières et le secteur de l’énergie, particulièrement en Europe et au Japon, où les perspectives économiques s’améliorent. Le secteur de la consommation de base – qui regroupe les entreprises actives dans l’alimentation et les produits essentiels – présente également des niveaux de valorisation attractifs, susceptibles d’attirer les investisseurs à la recherche de stabilité.
Obligations : la fin du resserrement quantitatif
Dans l’actualité financière, la Réserve fédérale (Fed) a annoncé en octobre une deuxième baisse consécutive de son taux directeur, tout en signalant qu’elle mettrait fin plus tôt que prévu à son programme de resserrement quantitatif (Quantitative Tightening ou QT)3.
Cette décision s’inscrit dans un environnement où la liquidité globale demeure confortable, mais où certaines frictions apparaissent, notamment sur le marché des pensions livrées (repo), qui permet aux banques de se financer à court terme en mettant en gage des titres obligataires. Ces tensions ont été accentuées par la faillite du concessionnaire automobile Tricolor, spécialisé dans les financements aux ménages peu solvables.
Dans ce contexte, les gérants obligataires adoptent une approche plus prudente. Ils privilégient désormais les bons du Trésor américain à duration faible — c’est-à-dire des obligations de courte maturité, moins sensibles aux variations de taux. Cette stratégie leur permet de profiter de taux d’intérêt encore attractifs, proches de 4 %, tout en limitant leur exposition aux incertitudes liées à l’évolution des conditions financières et à la soutenabilité de la dette publique américaine.
Deux vitesses
Ainsi, tandis que les marchés obligataires privilégient la prudence, les marchés actions font preuve d’un enthousiasme croissant, au risque de voir poindre une certaine euphorie sur certains segments.
Sources:
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Bloomberg Analytics
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Bloomberg Analytics
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Quantitative Tightening ou QT est un instrument que les banques centrales peuvent utiliser pour réduire la quantité d'argent en circulation afin de ralentir l'économie. Il s'agit d'une réaction opposée aux injections massives de liquidités (Quantitative Easing ou QE) qui ont notamment été effectuées pendant la crise du Covid.